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Combien coûte l’éthique dans le web ?

10 Oct 2018 | 3 minutes de lecture

Je comptais initialement traiter ce sujet dans la newsletter du blog, mais je me suis dit qu’il méritait d’y accorder suffisament de réflexion pour en faire un véritable article.


Il y a tant de choses à dire sur la Silicon Valley, cette petite région de la Californie qui a réussi en quelques années à changer la face du monde à grands renfort d’innovations technologiques. Malheureusement, la vallée est également devenue aujourd’hui le berceau d’une culture toxique sur bien des plans.

L’éthique commerciale est l’un de ces plans.

En mai, Google retirait de son code de conduite la phrase qui avait pourtant fait sa réputation à l’origine : “Don’t be evil”. Il faut dire que la dissonance entre le fameux motto et les agissements de la firme de Mountain View devait être difficile à vivre (Je pense notamment à Guillaume Chaslot qui explique que son travail sur l’algo de Youtube a indirectement contribué au Brexit).

Nous vivons dans une ère où les firmes internationales, tous domaines confondus, vendent leurs produits à grands renforts de Green-washing, de Health-washing et maintenant de Privacy-washing (depuis l’arrivée du RGPD, on a tous les jours droit à notre dose de popup “Votre vie privée est importante pour nous”, avec pour unique objectif l’installation d’un maximum de trackers). Ces entreprises ne s’adressent plus à des personnes, mais à des consommateurs, ces êtres influencables quand on tire les bonnes ficelles (pourtant parfois très grosses).

Il y a pourtant des exemples qui montrent que tout n’est pas noir. C’est le cas du geste de Brian Actor, co-fondateur de WhatsApp, qui a renoncé à 850 millions de dollars au nom de l’éthique. Cette interview qu’il a donné pour le magasine Forbes n’a pas fait beaucoup de bruit. Pourtant, elle envoie un message fort : l’éthique compte !

Cette interview raisonne avec une conférence de Laurent Chemla, co-fondateur de Gandi.net, à laquelle j’ai pu assister au printemps. Il nous invitait à nous interroger sur le rôle que nous avions, en tant que créateur·rice·s d’outils connectés face à l’éthique. Peut être est-ce aussi notre responsabilité de “forcer” les choix moraux, parfois au détriment d’une liberté totale des consommateur·rice·s.

C’est un raisonement qui peut paraitre liberticide de prime abord, mais il a du sens quand on le met en parallèle avec la théorie du Nudge, énoncée par le prix nobel d’économie 2017, Richard Thaler, qui part du principe que “celles et ceux qui savent" ont le devoir moral d’aiguiller vers les meilleures décisions possibles celles et ceux qui n’ont pas toutes les connaissances. Il pronne par exemple des services publics simplifiés où les choix des citoyens sont fait par défaut, mais dans leur intéret.

Alors même si l’on n’est pas amenés dans notre quotidien à perdre près d'1 milliard de dollars par éthique, on peut garder en tête la décision d’Acton la prochaine fois que l’on est face à une décision professionelle qui nous pose un problème moral.