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Petit cachotier (partie 2)

28 Feb 2021 | 4 minutes de lecture

La semaine dernière, je vous parlais d’une anecdote où mon N+1 de l’époque avait “découvert” le blog où je retraçais l’aventure d’un projet entrepreneurial que j’avais en parallèle de mon activité.

Si l’on s’est déjà attardé sur la forme de cette anecdote, on va aujourd’hui parler du fond. En effet, la conversation s’est vite orientée sur ma capacité à jongler entre mon activité de salarié et mon projet. Vous avez peut-être deviné la crainte de mon manager : que mon implication dans ce projet impacte négativement la qualité de mon travail.

Pourtant cette crainte ne devrait pas avoir lieu.

Le première raison, la plus évidente, c’est qu’un side project est généralement quelque chose de bénéfique pour le travail quotidien. C’est particulièrement vrai dans le développement. On le sait bien, c’est l’opportunité d’aller explorer des aspects techniques que l’on n’a pas forcément la possibilité de voir sur les sujets “pro”. C’est d’ailleurs pour ça que dans le recrutement, on voit une tendance à chercher des passionné·e·s qui vont se former sur leur temps libre. C’est d’autant plus vrais pour un projet entrepreneurial où l’on est obligé de s’intéresser à des aspects qui s’écartent de la programmation. Les compétences satélites comme la capacité à comprendre des enjeux business ou mettre en avant son travail apportent un supplément de valeur à une expertise technique.

Mais malgré ce bénéfice du side project, il y avait un aspect qui l’inquiétait plus, c’était l’investissement. Il avait peur que mon projet prenne de l’ampleur et que j’y consacre plus de temps … trop de temps.

J’étais junior et je n’avais pas de recul donc j’ai simplement écouté son discours. Dans ma tête, une petite voix disait “Cause toujours”. J’avais le sentiment que de toute façon il n’avait pas à me dire ça.

Moi dans ma tête, quand j'imagine expliquer à mon N+1 de se mettre ça où je pense.

Avec le recul des années et en étant passé du côté du management, je sais aujourd’hui qu’il avait tort et que mon intution était la bonne.

En tant que manager, on a facilement tendance à penser que les personnes que l’on encadre travaillent pour nous. C’est naturel, ça vient avec une partie des responsabilités, des décisions à prendre. Pourtant c’est une vision très taylorienne du management, qui gomme beaucoup les individualités.

Que l’on reste 1, 2, 5 ans ou plus dans une entreprise, c’est souvent un passage. Pendant ce passage, on travail ensemble, et en tant que manager ma carrière n’est pas plus importante que celle des personnes de mon équipe.

Je dirais même qu’il est de ma responsabilité de faire en sorte de faire progresser les personnes que j’encadre. Les américains ont une notion (assez récente) de servant leadership qui va justement dans ce sens : comprendre les individualités, et de les guider dans une dynamique qui leur permet d’avoir une carrière épanouissante.

Pour revenir à l’annecdote, le fait que je finisse par me consacrer plus sérieusement au projet était un danger, un risque de sortie de route à éviter, une éventuelle démission qu’il fallait gérer.

Et c’est là que le bât blesse. On voit bien trop souvent les démissions comme une trahison. Mais on n’est pas marié à son job, unis à jamais pour le meilleur et pour le pire. Non, si quelqu’un décide de partir, c’est son choix, et il ou elle ne doit rien à personne.

Alors bien sûr que ça m’emmerde quand quelqu’un de compétent quitte mon équipe. Mais c’est à moi de faire en sorte de pouvoir lui donner un travail suffisament challengeant pour progresser, et le cas échéant, d’être content de le ou la voir trouver ce challenge ailleurs.

Avoir un faible turnover dans une équipe, ce n’est pas un objectif, c’est une conséquence, un indicateur. Ce qui est gratifiant en revanche, c’est de voir des gens avec qui on a pris du plaisir à travailler poursivre dans une voie dans laquelle ils ou elles s’éclatent, et de se dire qu’à notre niveau, on leur a permi d’y parvenir.

C’est ça, le sens du métier.